Le mythe : Cette quête idiote du zéro frottement
On nous a vendu une histoire : une fable douce, tiède, insidieuse. Celle que le bonheur, c’est l’absence de tout dérangement. Le Saint Graal serait une vie lisse, sans aspérités, où chaque désagrément serait banni, chaque frustration éradiquée avant même d’apparaître.
La télé-réalité des réseaux sociaux nous bombarde d’images de vies parfaites, de brunchs illimités, de paysages de carte postale. Et nous, on achète. On s’échine à construire ce cocon douillet, cette forteresse anti-problèmes, où le seul murmure serait le ronronnement de nos désirs assouvis.
On se dit que si on gagne assez, on pourra s’offrir cette maison insonorisée, cette voiture à suspension adaptative, ces vacances où tout est géré. On rêve de ce moment où plus rien ne viendra nous bousculer.
On croit sincèrement que cette absence de contrainte est la liberté. C’est la plus grande arnaque du siècle, la promesse vide qui paralyse des millions d'esprits.
J'ai vu des patients, ligotés par cette illusion, telle cette femme d'affaires brillante. Appelons-la Anne.
Son entreprise cartonne, sa vie matérielle est un sans-faute. Pourtant, la moindre contrariété - un vol retardé, un restaurant complet, une remarque anodine d’un collègue - la plongeait dans une anxiété abyssale.
Elle avait tellement investi dans l'idée de "tout contrôler" pour ne jamais ressentir de friction qu'elle était devenue une esclave de cette quête impossible. La vie réelle, avec ses imprévus, était devenue son pire ennemi. Son confort était sa camisole de force.
Elle cherchait à s'anesthésier contre la moindre vibration, sans comprendre que c’est précisément dans les vibrations que la vie se révèle.
Le réel : Le piège systémique du bien-être aseptisé
Après 15 ans à décortiquer les schémas qui nous emprisonnent, ce que je constate est glaçant : cette quête obsessionnelle de confort est une tentative de solution qui crée le problème.
C'est un principe fondamental de l'approche systémique de Palo Alto. Plus vous essayez de fuir l'inconfort, plus vous en devenez dépendant, et plus la moindre dose d'inconfort vous semble insupportable.
C'est un cercle vicieux.
Imaginez :
Vous percevez une situation inconfortable (un défi au travail, une discussion difficile à avoir, une incertitude financière).
Votre cerveau, programmé pour "protéger", vous pousse à l'éviter ou à la résoudre de manière rapide et douce.
Vous déployez une "fausse solution" : vous procrastinez, vous déléguez ce qui est désagréable, vous achetez quelque chose pour compenser, vous vous réfugiez dans une distraction.
Succès apparent à court terme : L'inconfort disparaît momentanément. Votre cerveau enregistre que cette stratégie "a fonctionné".
Coût à long terme
Vous n'avez pas développé les compétences pour gérer ce type d'inconfort. Votre tolérance à la frustration diminue. La prochaine fois, l'inconfort vous semblera encore plus grand, et votre dépendance à la "fausse solution" s'accentuera.
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