La santé mentale est devenue en France une grande cause nationale.
Sur le papier, c’est magnifique : enfin, une société qui se penche sur l’invisible, qui s’occupe de ses plaies psychiques.
Mais derrière les discours officiels et les campagnes de communication, que reste-t-il ?
Un désert. Une farce et, pire encore, un mensonge.
C’est ce mensonge que nous devons regarder en face, car il a des conséquences profondes non seulement sur la santé psychologique des citoyens, mais aussi sur la manière dont nous considérons la responsabilité et l’action politique.
La grande cause nationale : un label ou une action ?
Dans le langage politique, une « grande cause nationale » est censée mobiliser tout le pays autour d’un sujet majeur. Mais ce label est devenu un simple vernis, un ruban que l’on accroche sur une porte fermée.
On brandit des slogans, on organise des colloques, et on croit qu’en collant des affiches dans le métro, on guérit les âmes.
La vérité ?
Les centres médico-psychologiques ferment, les psychiatres désertent, et les files d’attente pour une simple consultation atteignent plusieurs mois.
On proclame que la santé mentale est une priorité, tout en réduisant le nombre de lits d’hospitalisation.
Le gouvernement français se comporte comme ce magicien de foire qui détourne l’attention. A gauche, le prestidigitateur brandit une pancarte « Grande cause », et à droite, il fait disparaître les moyens.
Mensonge n°1 : parler d’écoute tout en organisant le silence
On nous répète qu’il faut « parler de santé mentale », qu’il faut briser les tabous. Alors, on organise des campagnes, on inonde les réseaux sociaux avec des mots comme « bienveillance » et « écoute ».
Mais cette « écoute » est un mot creux quand elle n’est suivie d’aucun acte concret.
Où sont les lieux pour parler ?
Où sont les professionnels formés, accessibles, remboursés ?
La communication devient une arme : elle sert à neutraliser la colère.
« On vous entend », disent-ils. Et pendant ce temps, les patients restent seuls dans les couloirs d’un système en ruine.
Mensonge n°2 : en faire une montagne qui accouche d’une souris
Le gouvernement adore les plans quinquennaux et les commissions d’experts.
Tous les deux ans, une « stratégie nationale » sort de terre. Et tous les deux ans, le diagnostic est le même :
- Manque de moyens,
- Désert médical,
- Absence de coordination.
Entre-temps, on a bricolé une plateforme numérique où les gens peuvent cliquer pour trouver un psy qu’ils ne pourront pas payer ou atteindre.
C’est un peu comme offrir une carte d’accès à un oasis en plein désert.
Sauf que la carte est fausse.
Mensonge n°3 : invisibiliser les conséquences
Les conséquences du mensonge ne sont jamais visibles tout de suite.
Elles sont silencieuses, lentes.
- Chaque jour, des adolescents se scarifient en cachette.
- Chaque jour, des adultes perdent leur travail parce que leur anxiété est devenue invivable.
- Chaque jour, des gens s’enfoncent un peu plus dans la dépression parce qu’ils ne trouvent pas d’aide accessible.
L’État fabrique du silence. Et ce silence tue.
Les statistiques sur le suicide ne sont que la partie émergée d’un iceberg beaucoup plus massif : celui de la souffrance ordinaire, banale, invisible.
L’impact psychologique : un peuple désabusé
Il y a une conséquence plus insidieuse encore que le manque de soins : c’est la perte de confiance.
Quand l’État proclame qu’il fait de la santé mentale une priorité mais qu’il ne fait rien, il apprend aux citoyens à ne plus croire en rien.
Ce double langage installe un climat délétère :
• On apprend à se méfier.
• On apprend que les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent.
• Et on finit par intégrer l’idée que rien ne changera jamais.
En psychologie systémique, ce phénomène s’appelle une tentative de solution répétée qui entretient le problème. Plus on promet, plus on déçoit, et plus le désespoir grandit.
La métaphore du phare sans lumière
Imaginez un phare construit pour sauver les bateaux. Il est flambant neuf, a coûté des millions, et est inauguré par des ministres.
Sauf que… : il n’a jamais été branché.
Les marins voient le phare, ils se disent qu’ils sont en sécurité. Et c’est précisément parce qu’ils y croient qu’ils s’échouent encore plus violemment sur les récifs.
La « grande cause nationale » fonctionne de la même façon.
On fait croire que la société protège les plus fragiles, alors qu’elle les abandonne.
Et si on arrêtait le mensonge ?
Arrêter le mensonge, ce n’est pas une affaire de communication.
C’est une question d’actes :
1. Former massivement des thérapeutes et leur donner les moyens d’exercer.
2. Simplifier l’accès : en France, on se perd dans les paperasses, les listes d’attente et les consultations non remboursées.
3. Cesser la communication creuse et parler vrai.
Il n’y a rien de pire que la bienveillance administrative : elle est polie, elle a l’air gentil, mais elle vous laisse crever dans l’antichambre.
Le courage de dire les choses
La santé mentale est une urgence nationale.
La traiter comme une « opération image » est une trahison.
A force de travestir la réalité, on finit par créer une société entière qui se construit sur le déni.
Et une société qui nie sa souffrance est une société malade.
Il est temps que le gouvernement français comprenne que la confiance se mérite. Et que ce mérite ne s’acquiert pas par des campagnes mais par des actes.
Questions et réponses (FAQ)
1. La « Grande Cause nationale » sur la santé mentale, qu’est-ce que c’est, et est-ce efficace ?
La « Grande Cause nationale » est une opération de communication lancée par le gouvernement pour sensibiliser le public sur un sujet majeur.
Son efficacité est remise en question car elle est perçue comme un simple vernis ou un mirage. L’article soutient qu’elle détourne l’attention des problèmes réels (manque de moyens, lits fermés, désertion des professionnels) sans y apporter de solutions concrètes.
2. Pourquoi les délais pour voir un psychiatre ou un psychologue sont-ils si longs en France ?
Les longs délais s’expliquent par un manque de professionnels. Il est fait état de la fermeture de centres médico-psychologiques, de la désertion des psychiatres et d’une offre de soins qui ne cesse de se réduire, alors même que la demande augmente.
3. Le manque de moyens en psychiatrie est-il un problème reconnu par l’État ?
L’État est bien évidemment mis en cause, tout en reconnaissant les problèmes (manque de moyens, désert médical), et qu’il se contente de mettre en place des « cauters sur une jambe de bois » (comme les plateformes numériques) au lieu d’investir massivement. Cette approche fabrique du silence et entretient le problème puisque c’est la preuve du désengaggement de l’état.
4. Quelles sont les conséquences psychologiques de ces « mensonges d’État » sur la population ?
Les conséquences les plus insidieuses sont la perte de confiance et le désabusement.
Le double langage de l’État, qui promet sans agir, apprend aux citoyens à se méfier et à intégrer l’idée que rien ne changera jamais, ce qui alimente un sentiment de désespoir voire de colère et de ressentiment.
5. Comment peut-on améliorer la situation concrètement, au-delà des déclarations politiques ?
L’article propose des solutions concrètes :
- Former massivement des thérapeutes,
- Leur donner les moyens d’exercer,
- Simplifier l’accès aux soins,
- Cesser la communication creuse pour « parler vrai » et agir avec des actes.
Important
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Ressources
Plaidoyer de l’Uniopss sur la politique de santé mentale
Ce document de l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux offre un état des lieux détaillé et des propositions concrètes pour une politique de santé mentale globale.
Rapport de la FHF sur la psychiatrie
La Fédération Hospitalière de France (FHF) expose dans ce communiqué les difficultés d’accès aux soins en psychiatrie et formule des propositions pour répondre à l’urgence.
Ministère de la Santé – La santé mentale en 5 questions clés
Une page officielle qui présente les défis de la santé mentale en France, les chiffres clés, et les actions mises en place par l’État. C’est une source utile pour confronter les discours officiels à la réalité.
L’Institut Montaigne sur la Grande Cause nationale
Cette analyse, bien que plus ancienne, soulève déjà la question de l’efficacité de la « Grande Cause nationale » et propose une vision systémique de la santé mentale.